Compte tenu des avantages de la photographie en pratique clinique et de la grande commodité des appareils mobiles, il n'est pas surprenant que plus de 89 % des médecins canadiens et que tous les étudiants et résidents en médecine se servent de téléphones intelligents pour prendre des photos médicales des patients1. Cependant, faute d'applis conçues expressément pour l'échange sécurisé d'images médicales, la plupart des professionnels de la santé se tournent vers des outils comme iMessage et Whatsapp et utilisent leur album photo personnel pour y stocker les images. Il en résulte un accès non autorisé aux renseignements d'un patient une fois sur quatre à partir des téléphones intelligents de ces utilisateurs. Bien qu'ils se servent de leur téléphone intelligent pour prendre des photos médicales, la moitié des cliniciens interrogés dans le cadre de l’étude disent ressentir un certain malaise par rapport à cette pratique. Pour expliquer leurs réserves, ils évoquent principalement des raisons de sécurité, de confidentialité et de protection des renseignements personnels, de même que leur manque de connaissance des politiques régionales1. Étant donné que l'information sur la santé sous forme photographique est considérée comme l'un des types de renseignements les plus personnels et les plus délicats qu'une personne puisse posséder, leurs craintes sont tout à fait fondées.
Le Dr Justin Yeung et son équipe de chercheurs de l'Université de Calgary ont réalisé en 2017 une étude sur les règles et lignes directrices applicables à l'utilisation du téléphone intelligent en milieu clinique. Ils ont constaté que la majorité des ordres professionnels provinciaux avaient formulé des recommandations inadéquates à cet égard. En outre, les recommandations visaient souvent des technologies obsolètes comme le courriel et la télécopie2. L'équipe de recherche était composée d'experts en cybersécurité, d'éthiciens en médecine, de professionnels de la santé ainsi que d'avocats francophones et anglophones. Se reportant aux principes des ordres professionnels provinciaux et de l'Association canadienne de protection médicale, de même qu'aux pratiques exemplaires d'autres industries, les chercheurs ont dégagé des lignes directrices au sujet des pratiques d'excellence, y compris les principales recommandations liées à six aspects clés : le consentement, la vérification, la transmission, le stockage, la conservation et le manquement à l'obligation de confidentialité. Le fruit de leurs travaux — des lignes directrices nationales sur l'échange de photos médicales et l'utilisation du téléphone intelligent2 — a permis à Mieke Heyns, étudiante en médecine, de remporter un prix au récent symposium de recherche en chirurgie de l'Université de Calgary.
Au moment où le secteur de la santé passe à l'ère du numérique, il est plus essentiel que jamais d'adopter des lignes directrices et des pratiques exemplaires à l'échelle nationale. Dans un contexte où l'information sur la santé est de plus en plus accessible sous forme numérique et où les mesures de sécurité font appel à la biométrie, la protection de ces actifs est prioritaire. Partant des meilleures pratiques de sécurité et de confidentialité, le Dr Yeung a mis sur pied une équipe multidisciplinaire dont le mandat était de créer la solution ShareSmart. Approuvée par le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada et par les commissariats de plusieurs provinces, ShareSmart est une solution novatrice qui permet aux professionnels de la santé d'utiliser leur propre téléphone cellulaire pour prendre des photos médicales et communiquer par messagerie de manière sécurisée, le tout en conformité avec les lois sur la protection des renseignements personnels.
La solution rejoint tout à fait la raison d'être de la Conférence du Partenariat, puisqu'elle contribue elle aussi à moderniser les soins de santé grâce à des solutions de santé numériques sûres, pour le bien de tous les patients. Nous sommes ravis de figurer parmi les commanditaires de la Conférence du Partenariat d'Inforoute et d'être l'une des quatre jeunes entreprises canadiennes en vedette à cet événement.
Dr Justin Yeung, MD, FRCSC.
Le Dr Yeung est chirurgien plastique à l'Université de Calgary et cocréateur de la solution ShareSmart. Ayant effectué sa résidence au Canada et suivi un programme de surspécialité aux États-Unis (New York), il apporte une expérience clinique unique et propose des applications inédites à l’équipe de Think Tank Innovations, entreprise vouée à la recherche de solutions technologiques pour remédier aux problèmes du domaine de la santé. Il est un pédagogue et un chercheur émérite en ce qui touche la pratique professionnelle à l'ère du numérique. Il s'intéresse tout particulièrement à l'amélioration de l'expérience du patient grâce à une meilleure coordination et collaboration multidisciplinaire.
References:
(1) Chan, N., Charette, J., Dumestre, D. O., et F. O. Fraulin (2016). « Should smart phones' be used for patient photography? », Plastic Surgery, 24(1), Division de la chirurgie plastique, Département de chirurgie, Université de Calgary, Canada
(2) M. Heyns, A. Steve, D. Dumestre, F. Fraulin, et J. Yeung (2017). « What are the College of Physicians and Surgeons’ guidelines on smartphone clinical photography? », publication imminente